Points clés
1. Le « péché » de la certitude : la foi ne consiste pas à tout savoir
Le besoin de certitude est un péché parce qu’il naît de la peur et réduit Dieu à nos images mentales.
La certitude n’est pas la foi. Nous assimilons souvent une foi forte à des croyances inébranlables et incontestables sur Dieu et le monde. Cette obsession de la pensée juste peut pourtant devenir un « péché » car elle repose sur la peur et cherche à enfermer Dieu dans notre compréhension humaine limitée. Elle transforme la foi en un exercice intellectuel plutôt qu’en une relation vivante.
L’idolâtrie de la pensée. Tout comme les Israélites anciens étaient avertis contre la fabrication d’idoles physiques limitant Dieu, nous pouvons créer des idoles mentales en nous accrochant trop fermement à nos idées sur Dieu. Lorsque notre foi repose sur le fait d’avoir raison plutôt que sur la confiance en Dieu, nous plaçons en réalité notre propre pensée au-dessus du Créateur. Cela freine notre croissance et nous maintient dans un espace religieux sûr et prévisible.
La peur alimente la certitude. Ce besoin intense d’être certain découle souvent d’une peur profonde d’avoir tort, de perdre le contrôle ou de décevoir Dieu. Cette peur pousse à défendre farouchement ses croyances, parfois même à attaquer ceux qui pensent autrement, au lieu d’accueillir la vulnérabilité et l’ouverture que requiert la véritable confiance.
2. Les moments « oups » de la vie brisent nos certitudes
Les épreuves de la vie se moquent puis détruisent une foi fondée sur la pensée correcte et la défense acharnée de celle-ci.
La vie arrive. Des instants inattendus, comme regarder un film Disney, rencontrer des perspectives différentes ou affronter des tragédies personnelles, peuvent soudainement remettre en question nos façons familières de penser Dieu. Ces moments « oups » introduisent de l’instabilité dans une foi jadis stable, surgissant sans prévenir et nous forçant à affronter des questions inconfortables.
La certitude s’effondre. Une foi bâtie sur la certitude absolue de ce que nous croyons est mal équipée pour gérer la nature chaotique et imprévisible de l’existence humaine. Quand la vie ne suit pas notre scénario théologique – que ce soit par la souffrance, des découvertes scientifiques contredisant le littéralisme biblique, ou la rencontre de personnes véritablement bonnes hors de notre tradition – notre certitude soigneusement construite commence à se défaire.
Une invitation à grandir. Ces expériences déstabilisantes, bien que terrifiantes, peuvent être perçues comme des « moments divins » – des invitations à approfondir notre relation avec Dieu au-delà d’un simple assentiment intellectuel. Elles révèlent l’insuffisance d’une foi qui exige que tout ait un sens parfait et nous poussent vers une foi enracinée dans la confiance, même lorsque la compréhension fait défaut.
3. La Bible elle-même montre le doute et l’interrogation envers Dieu
Se sentir éloigné de Dieu, croire qu’Il est indifférent ou mort pour soi fait partie de notre Bible et ne peut être balayé d’un revers de main.
Un lament sincère. La Bible contient des voix qui expriment une honnêteté brute et troublante sur leur relation avec Dieu, loin de la certitude polie souvent attendue à l’église. Les psaumes de lamentation, comme le psaume 88, crient leur désespoir, se sentant abandonnés et accusant Dieu directement de leur souffrance. Ce ne sont pas des exemples de foi faible, mais des expressions courageusement honnêtes de celle-ci.
Dieu, peu fiable ? Des figures comme l’auteur du psaume 89 remettent en question la fidélité de Dieu lorsque les promesses divines (comme la lignée davidique éternelle) semblent brisées par des événements historiques (comme l’exil babylonien). Qohelet dans l’Ecclésiaste trouve la vie absurde et vaine, questionnant le sens de tout, y compris le rôle de Dieu, quand la mort annule tout effort et que le monde ne suit pas les règles attendues de justice.
La lutte juste de Job. L’histoire de Job défie directement la théologie simpliste du « tout acte a sa conséquence », montrant un homme juste souffrant énormément sans raison apparente. Les amis de Job s’accrochent à leur théologie certaine, affirmant qu’il doit avoir péché, tandis que Job confronte Dieu honnêtement, exigeant une explication. Dieu finit par affirmer le questionnement sincère de Job plutôt que la certitude rigide de ses amis.
4. La foi, c’est faire confiance à Dieu (Qui), pas seulement croire en Dieu (Quoi)
Dans ce livre, je soutiens que nous avons mal compris la foi comme un mot de « quoi » plutôt que de « qui » — comme principalement des croyances sur Dieu plutôt que comme une confiance en Dieu.
Au-delà de l’assentiment intellectuel. Dans la culture occidentale moderne, « croire » signifie souvent un accord intellectuel avec un ensemble de propositions (« Je crois que Dieu existe »). Pourtant, le concept biblique de foi (hébreu 'aman, grec pistis) concerne fondamentalement la confiance en une personne – Dieu. C’est un mot de « qui », pas de « quoi ».
La confiance en action. Des exemples bibliques l’illustrent : Abraham « crut » (fit confiance) à la promesse de Dieu d’une descendance malgré son âge. Le père qui demande à Jésus de guérir son fils s’écrie : « Je crois ; viens au secours de mon incrédulité ! » – une demande d’aide pour faire confiance, pas seulement une certitude intellectuelle. Jacques note même que les démons « croient » (que Dieu est un) et tremblent, montrant que la simple croyance intellectuelle est insuffisante.
Un abandon total. Remplacer « croire » par « faire confiance » dans les passages bibliques révèle un appel plus profond et exigeant. Proverbes 3:5-6 exhorte : « Confie-toi en l’Éternel de tout ton cœur, et ne t’appuie pas sur ta propre intelligence. » C’est un appel à un abandon complet, s’appuyant entièrement sur Dieu plutôt que sur notre propre compréhension, surtout quand les choses n’ont pas de sens.
5. La vraie confiance exige de lâcher prise et de « mourir » à soi-même
Le doute ne signale pas la mort de Dieu, mais la nécessité de notre propre mort — mourir à la théologie que nous serrons à pleines mains.
L’emprise de l’ego. Notre besoin de certitude est souvent lié au désir de contrôle de notre ego. Nous voulons comprendre, prévoir et gérer notre vie et notre relation avec Dieu. S’accrocher à une théologie « correcte » nous donne une fausse impression de sécurité et de maîtrise du divin.
Jésus nous appelle à mourir. L’appel de Jésus à « prendre sa croix » et à « perdre sa vie » est une invitation radicale à mourir à ce besoin égocentrique de contrôle et de certitude. Ce n’est pas un événement unique de conversion, mais un processus quotidien, moment après moment, d’abandon de notre volonté, de notre compréhension et de notre contrôle perçu à Dieu.
Crucifiés avec le Christ. L’apôtre Paul décrit la vie chrétienne comme étant « crucifié avec Christ », où « ce n’est plus moi qui vis, mais Christ qui vit en moi ». Ce langage mystique pointe vers une transformation profonde où notre ancien moi, y compris le besoin d’avoir raison et de contrôler, meurt, laissant émerger une vie nouvelle enracinée en Christ et cachée en Dieu.
6. Le doute et la souffrance peuvent être des chemins sacrés vers une confiance plus profonde
Le doute est un instrument de Dieu, il arrive au temps de Dieu, et vient de lieux inattendus — des lieux hors de votre contrôle.
Le doute n’est pas l’ennemi. Bien que douloureux et déstabilisant, le doute n’est pas forcément un signe d’échec spirituel ou d’absence de Dieu. Il peut être un instrument sacré utilisé par Dieu pour démanteler nos fausses certitudes et nous pousser vers une confiance plus profonde et résiliente. Il révèle les limites d’une foi fondée uniquement sur la compréhension intellectuelle.
La nuit obscure. Des mystiques comme saint Jean de la Croix décrivent la « nuit obscure de l’âme » comme une période d’aliénation douloureuse de Dieu, dépouillant des conforts et idées familiers. Cette obscurité, bien qu’elle ressemble à un abandon, est vue comme la présence purificatrice de Dieu, nous forçant à lâcher prise et à apprendre à faire confiance à Dieu simplement parce que Dieu est Dieu, non parce que nous nous sentons proches ou comprenons.
Souffrir avec le Christ. Le Nouveau Testament parle de « partager » les souffrances du Christ, suggérant que notre propre douleur, y compris l’angoisse du doute et le sentiment d’abandon par Dieu, nous relie intimement à l’expérience de Jésus sur la croix. Cette souffrance, bien que non recherchée, peut être un chemin pour connaître Christ plus profondément, non seulement dans la puissance de la résurrection, mais dans la vulnérabilité partagée.
7. Cultiver la confiance est une habitude de toute une vie forgée dans l’obscurité
Faire confiance à Dieu est une habitude, prête et capable de fortifier dans l’heure du besoin.
La confiance est une pratique. La confiance n’est pas un état statique mais une habitude dynamique qui doit se cultiver avec le temps, souvent à travers des expériences difficiles. Comme un muscle, elle se renforce par l’usage, surtout quand nos mécanismes habituels (comme le besoin de comprendre ou de contrôler) nous abandonnent.
Des pierres d’aide pour se souvenir. Se remémorer les « moments divins » passés – des expériences de la présence ou de l’aide de Dieu défiant toute explication rationnelle – peut servir d’« Ébénézers », pierres d’aide rappelant de faire confiance durant les périodes d’obscurité ou d’incertitude. Ces moments, bien que rares ou subtils, offrent un socle pour continuer à faire confiance quand la compréhension fait défaut.
Une rénovation continue. La vie de foi est un processus constant de reconstruction et de rénovation, où d’anciennes structures de certitude doivent parfois être démolies. Cela exige d’accepter que le chemin n’est pas linéaire, d’embrasser les périodes d’instabilité, et d’apprendre à honorer notre intellect sans le laisser être le seul arbitre de la vérité ou le gardien de notre foi.
8. L’amour des autres est l’expression ultime de la confiance en action
Peut-être que ma première tâche est de risquer ma propre certitude sur Dieu et d’aimer les autres tels qu’ils sont, peu importe leur résultat à mon examen théologique.
Au-delà de la pensée juste. Une foi obsédée par la pensée correcte peut mener au jugement, à l’exclusion, voire au mal envers ceux qui croient autrement. Cette focalisation sur le fait d’avoir « raison » éclipse souvent l’appel chrétien fondamental à aimer Dieu et le prochain.
L’amour prend le risque de la certitude. Le véritable amour, tel que décrit par Jésus, s’étend même aux ennemis et à ceux hors de nos cercles familiers. Ce type d’amour exige de risquer notre propre certitude et de renoncer au besoin que les autres se conforment à nos croyances. Cela signifie voir les autres comme précieux, faits à l’image de Dieu, indépendamment de leur position théologique.
Agir comme Dieu. Quand nous aimons les autres de manière désintéressée, surtout ceux que nous serions tentés de juger ou d’exclure à cause de nos certitudes, nous agissons le plus comme Dieu. Comme le dit 1 Jean 4:12 : « Personne n’a jamais vu Dieu ; si nous nous aimons les uns les autres, Dieu demeure en nous, et son amour est parfait en nous. » L’amour est l’expression tangible de notre confiance en Dieu et de notre fidélité à la nature divine.
9. Lâcher prise sur la certitude fait de nous de meilleures personnes et témoins
Adopter et cultiver intentionnellement chez les chrétiens une culture de confiance en Dieu, plutôt que de former des soldats pour des guerres saintes, neutraliserait ces perceptions publiques et révélerait davantage la véritable foi chrétienne — et Dieu.
Liberté face à la peur. Se libérer du besoin de certitude nous affranchit de l’anxiété et de la belliqueuse agressivité qui l’accompagnent souvent. Plutôt que d’être définie par une rigidité dogmatique et un besoin de gagner des débats, une foi centrée sur la confiance favorise l’humilité, l’ouverture et la vulnérabilité.
Un témoignage authentique. Quand les chrétiens sont plus connus pour leurs certitudes inébranlables et leur jugement que pour leur confiance, leur amour et leur humilité, cela déforme le message de l’Évangile. Une culture de confiance permet cependant à la véritable nature de la foi chrétienne – enracinée en un Dieu mystérieux, incarné et ressuscité – de briller, la rendant plus convaincante et moins semblable à une idéologie cherchant le pouvoir.
Protéger l’avenir. Les communautés de foi ont la responsabilité de cultiver une culture de confiance pour les générations futures. Cela signifie embrasser la nature dynamique de la foi, rester ouvertes au mouvement de l’Esprit, et valoriser la réflexion critique plutôt que de s’accrocher rigidement aux formes ou certitudes passées. Cette souplesse, visible tout au long de l’histoire biblique, n’est pas un compromis mais une démonstration de foi en un Dieu vivant.
10. Embrasser le mystère : Dieu est plus grand que notre compréhension
Faire confiance à ce Créateur incarné nous donne la liberté de savoir ou de ne pas savoir, d’accepter la certitude quand elle vient ou son absence, la clarté ou le doute, le repos ou l’agitation.
Une foi transrationnelle. Les mystères centraux du christianisme – l’incarnation (Dieu devenu humain) et la résurrection (victoire sur la mort) – sont fondamentalement « transrationnels ». Ils échappent à la pleine saisie de notre raison et se connaissent ultimement par la confiance et l’expérience, pas seulement par la compréhension intellectuelle.
Dieu ne se laisse pas contenir. Un Dieu que l’on pourrait entièrement comprendre et enfermer dans nos cadres mentaux serait trop petit. Embrasser le mystère reconnaît que Dieu est infini, éternel, et nécessairement au-delà de notre pleine portée. Cela ne nie pas la valeur de penser à Dieu, mais remet cette pensée à sa juste place – comme un aspect de la foi, non son tout ni son fondement.
La liberté de ne pas savoir. Faire confiance à un Dieu plus grand que notre compréhension nous libère de la pression d’avoir toutes les réponses. Cela nous permet de naviguer dans les complexités, les doutes et les incertitudes de la vie avec courage et humilité, reposant sur la certitude que notre foi est ancrée en un Dieu digne de confiance, et non dans la fragilité de nos propres certitudes.
Dernière mise à jour:
Avis
Le Péché de la Certitude suscite des avis partagés, nombreux sont ceux qui saluent son exploration du doute et de la foi. Les lecteurs apprécient l’approche personnelle d’Enns ainsi que son insistance sur la confiance en Dieu plutôt que sur des croyances rigides. Certains trouvent cet ouvrage libérateur et éclairant, tandis que d’autres le critiquent, l’accusant de promouvoir l’incrédulité ou de manquer de profondeur. Les détracteurs reprochent à Enns de saper l’autorité biblique, alors que ses partisans le considèrent comme une ressource précieuse pour ceux qui traversent des crises de foi. Le style accessible du livre et son invitation à accueillir l’incertitude dans la vie spirituelle touchent un large public.