In the Shadows of the Net

1. Le cybersexe : un phénomène puissant et répandu, mais avec une « face cachée »

Pour certaines personnes, l’attrait du cybersexe peut être si fort que, comme l’alcool ou d’autres drogues, il devient difficile à lâcher et à maîtriser.

Une nouvelle frontière. Internet a révolutionné la communication et l’accès à l’information, y compris dans le domaine sexuel. Des millions d’adultes visitent régulièrement des sites pornographiques, alimentant une industrie de plusieurs milliards de dollars. Cette disponibilité massive engendre une « face cachée » où l’attrait du cybersexe devient difficile, parfois apparemment impossible, à contrôler pour beaucoup.

Un problème en expansion. Ce phénomène grandit, provoquant des souffrances personnelles, familiales et professionnelles importantes. Ce qui peut commencer par une simple curiosité peut rapidement se transformer en comportement compulsif, mettant en péril carrières et relations. Ce problème touche hommes et femmes de tous horizons, souvent dans le silence, en raison de la honte et de la culpabilité.

Au-delà de l’imaginable. Il y a seulement une décennie, l’impact omniprésent d’Internet, notamment sur la sexualité, était inimaginable. Son intégration rapide dans la vie quotidienne, le travail et les interactions sociales a modifié nos modes de pensée et nos relations, rendant presque inconcevable aujourd’hui un monde sans lui.

2. Le cybersexe problématique se caractérise par la compulsion, les conséquences et l’obsession

Trois critères servent souvent d’indicateurs : la compulsion, la poursuite malgré les conséquences, et l’obsession.

Perte de contrôle. La compulsion désigne l’incapacité à choisir librement d’arrêter ou de continuer un comportement, distincte d’une simple habitude. Elle se manifeste par des rituels enchevêtrés, une frustration écrasante, l’auto-accusation, le sentiment d’impuissance et de désespoir, comme en témoignent des récits d’individus passant des heures en ligne malgré leurs intentions d’arrêter.

Ignorer le coût. La poursuite malgré des conséquences négatives signifie persister dans le comportement alors qu’il nuit à la santé, au travail, aux relations ou à la liberté. Les personnes concernées peuvent rationaliser ou minimiser ces effets, cherchant des moyens de continuer sans se faire prendre, révélant une perception déformée de la réalité.

Préoccupation constante. L’obsession se traduit par une focalisation telle sur le comportement qu’elle exclut d’autres aspects de la vie. Les pensées liées au sexe en ligne consomment l’énergie mentale, tournant autour de la planification de la prochaine séance, des expériences passées ou des fantasmes futurs, perturbant travail, détente et sommeil.

3. Les caractéristiques uniques d’Internet (le CyberHex) rendent le cybersexe particulièrement puissant et addictif

La combinaison de toutes les facettes du CyberHex crée une force puissante que beaucoup de cybersexuels compulsifs comparent à la séduction exercée par une drogue sur un toxicomane.

Le CyberHex expliqué. Un modèle nommé CyberHex identifie six composantes qui rendent Internet irrésistible pour les activités sexuelles :

• Intégral : profondément ancré dans la vie quotidienne, rendant l’évitement difficile.
• Imposant : sa nécessité et son contenu immense peuvent submerger.
• Isolant : il permet une implication privée et anonyme, séparant l’utilisateur du contact réel.
• Interactif : il offre contrôle utilisateur et pseudo-intimité, créant un sentiment de communauté.
• Peu coûteux : il propose un contenu vaste à faible coût comparé aux alternatives hors ligne.
• Enivrant : il procure un accès et une stimulation immédiats, générant une euphorie comparable à un « rush ».

Un état de transe. Ces facteurs s’assemblent pour créer un état « hexagonal » ou de transe, rendant difficile la maîtrise de l’usage. L’accès instantané à une quantité stupéfiante d’informations et de stimulations alimente une demande sociétale de gratification immédiate, renforçant l’attrait du cybersexe.

Vulnérabilité amplifiée. Le CyberHex accroît le risque chez ceux déjà en proie à la compulsion sexuelle ou émotionnellement fragiles. Il amplifie le pouvoir de l’isolement, du fantasme, de l’anonymat et de l’accessibilité, poussant un usage modéré vers des niveaux problématiques ou compulsifs pour des millions de personnes.

4. Le cybersexe peut déformer nos croyances fondamentales, notre pensée et créer un cercle addictif

L’addiction commence par des processus de pensée délirants, enracinés dans le système de croyances de l’individu.

Fondations défaillantes. L’addiction est un système alimenté par des pensées délirantes issues de croyances fondamentales erronées sur soi et les relations. Parmi celles-ci : « Je suis fondamentalement une mauvaise personne », « Personne ne m’aimerait tel que je suis », « Mes besoins ne seront jamais satisfaits si je dépends des autres », et « Le sexe est mon besoin le plus important ».

Pensée altérée. Ces croyances conduisent à une vision déformée de la réalité, marquée par le déni, la rationalisation et le blâme. Les addicts ignorent ou attribuent les conséquences négatives à des facteurs externes, justifiant leur comportement par des excuses telles que « J’ai juste un fort désir sexuel » ou « Ça ne fait de mal à personne ». Cette pensée altérée protège le cycle addictif de la réalité.

Le cercle auto-entretenu. L’expérience addictive suit un cycle en quatre étapes :

• Préoccupation : pensées obsessionnelles sur le sexe, créant un état de transe.
• Ritualisation : routines spécifiques précédant le comportement, intensifiant l’excitation.
• Comportement sexuel compulsif : l’acte incontrôlable lui-même.
• Incontrôlabilité et désespoir : sentiments d’impuissance et de désespoir après l’acte.
  Ce cycle se répète, la préoccupation engourdissant la douleur du désespoir, isolant progressivement l’addict et rendant la vie ingérable.

5. Le cybersexe impacte profondément nos schémas d’excitation et déforme la séduction et les relations

Ce modèle de séduction s’applique aussi à des comportements « non pervers » comme la compulsion sexuelle dans le mariage, la masturbation compulsive ou la prostitution compulsive, et offre un cadre pour comprendre le cybersexe problématique.

Les schémas d’excitation sont fluides. Notre schéma d’excitation, constellation des éléments qui nous excitent sexuellement, n’est pas figé mais malléable. Influencé par la biologie, la culture et l’histoire, il peut être rapidement modifié par de nouvelles expériences, notamment l’offre vaste et variée du cybersexe.

Séduction dévoyée. La séduction est le processus de création et de construction des relations, impliquant des étapes comme la perception, l’attraction, la séduction, la démonstration, la romance, l’intimité et l’engagement. Le cybersexe déforme ce processus en :

• Limitant les indices non verbaux (métamessages) lors de la perception et de la séduction.
• Permettant des personnages fantasmés, rendant la démonstration et la romance basées sur des projections, non sur la réalité.
• Offrant une pseudo-intimité sans connexion physique ni vulnérabilité.

Le « moment érotique ». Le cybersexe offre d’innombrables occasions de « moments érotiques » détachés de l’acte sexuel ou de l’intimité réelle, comme le frisson de la chasse, la recherche d’images spécifiques ou l’acte de séduction en ligne. Cela peut renforcer des schémas d’excitation malsains liés au pouvoir, au contrôle ou à la dégradation plutôt qu’à une connexion authentique.

6. Le cybersexe érode les limites personnelles et favorise l’isolement

Internet devient une sorte de caisson d’isolation sensorielle dans lequel on flotte mentalement, sans distraction ni trouble d’une voix intérieure soudainement étouffée.

Les limites définissent le soi. Les limites sont une relation avec soi-même, apprendre à dire non à ce qui nous nuit et prendre soin de nos besoins intérieurs. Des limites saines s’apprennent par une parentalité bienveillante ; les familles dysfonctionnelles engendrent souvent des limites trop lâches (invasion) ou trop rigides (abandon).

Le cybersexe contourne les limites. Internet facilite l’ignorance de notre voix intérieure et l’effondrement des limites. Sa nature apparemment irréelle permet la rationalisation (« Ce n’est pas réel », « Ça ne fait de mal à personne »), rendant facile l’engagement dans des comportements que l’on éviterait hors ligne. Cela contourne le système d’alarme interne qui signale quand on agit contre ses valeurs.

Isolement amplifié. Le cybersexe nourrit le besoin d’isolement, offrant un moyen d’interagir tout en maintenant une barrière. Ce détachement empêche une intimité véritable et renforce des mécanismes d’adaptation malsains appris dans l’enfance, où la dissociation servait à gérer un traumatisme. La honte liée à la violation des limites isole davantage l’utilisateur.

7. La guérison commence par l’aveu d’impuissance et d’ingérabilité (Première Étape) et implique un travail de deuil

La Première Étape comporte deux éléments essentiels, le premier étant la reconnaissance de ses limites.

L’étape essentielle. Faire la Première Étape signifie admettre son impuissance face aux comportements liés au cybersexe et que la vie est devenue ingérable en conséquence. Cela exige de reconnaître que, contrairement à d’autres, on ne peut pas contrôler son usage et qu’on a besoin d’aide. Cet aveu est la base de tout travail de rétablissement.

Faire le deuil. Accepter que le cybersexe doit cesser déclenche un processus de deuil. Ce deuil porte sur :

• La perte de la capacité à s’adonner au cybersexe.
• La « mort » de la vie fantasmatique sexuelle construite autour.
• La reconnaissance des pertes passées (relations, emploi, santé) dues au comportement.
• La peur de perdre son identité et l’incertitude de vivre sans ce « compagnon ».

Traverser le deuil. Les programmes des Douze Étapes offrent un cadre pour ce deuil, aidant à traverser déni, colère, marchandage, puis acceptation. Des étapes comme l’inventaire moral et les réparations aident à traiter la honte et à reconstruire des liens, transformant la souffrance en sagesse et profondeur.

8. La guérison nécessite à la fois des changements comportementaux immédiats (de premier ordre) et une transformation personnelle plus profonde (de second ordre)

Les changements de second ordre sont ceux qui modifient réellement la dynamique de votre vie et votre manière de vivre.

Contrôle immédiat. Les changements de premier ordre sont des actions concrètes pour arrêter rapidement le comportement problématique et gérer les conséquences immédiates. Ils ressemblent à la pose d’attelles et de pansements après un accident, stabilisant la situation à court terme. Exemples :

• Réduire l’accès (déplacer l’ordinateur, fixer des limites de temps).
• Réduire l’anonymat (utiliser son vrai nom en ligne).
• Réduire l’objectification (placer des photos de famille près de l’ordinateur).
• Augmenter la responsabilité (partager les historiques).
• Développer des habitudes en ligne saines (sites de rétablissement).

Guérison plus profonde. Les changements de second ordre s’attaquent aux causes sous-jacentes et aux dynamiques de l’addiction, menant à une transformation durable. C’est comme soigner des blessures internes après un accident, nécessitant plus de temps et un accompagnement professionnel. Cela implique :

• Traiter les problèmes familiaux et traumatismes passés.
• Restructurer la relation à soi (démanteler la barrière interne).
• Développer un solide réseau de soutien (thérapie, parrain, groupes).
• Apprendre à vivre dans la « Zone de Rétablissement » (équilibre, pas d’extrêmes).

Les deux sont indispensables. Si les changements de premier ordre apportent une stabilité immédiate cruciale, ils sont insuffisants pour une guérison durable. Sans aborder les causes profondes par les changements de second ordre, le risque de rechute reste élevé, car les racines du comportement problématique demeurent intactes.

9. La rechute est fréquente mais peut être évitée en comprenant les déclencheurs, les pièges et en maintenant le soutien

La rechute fait partie intégrante du processus de changement.

Une spirale ascendante. Le changement est rarement linéaire ; la rechute est une étape courante, vue non comme un échec mais comme une opportunité d’apprentissage. Chaque rechute permet de réévaluer et d’affiner le plan de rétablissement, progressant ainsi en spirale ascendante.

Décisions apparemment insignifiantes (DAI). La rechute résulte souvent d’une chaîne de petites décisions apparemment sans importance prises au fil du temps. Ces DAI rapprochent lentement la personne d’une situation à haut risque, souvent alimentées par la rationalisation ou le déni, donnant l’impression que des circonstances extérieures en sont la cause.

Éviter les pièges. La conscience des pièges courants est essentielle :

• Croire que le problème est résolu après la crise initiale.
• Chercher le chaos ou l’excitation pour se sentir vivant.
• S’attendre à une guérison immédiate et sans douleur.
• Penser pouvoir gérer une consommation contrôlée.
• Minimiser les conséquences passées (« amnésie de l’addiction »).
• Croire que son problème est unique.
• Voir un écart comme un échec total.
• Se sentir submergé par l’idée d’un rétablissement à vie.
• Penser pouvoir guérir seul.
• Minimiser l’impact sur partenaires et famille.

Stratégies de prévention. Élaborer un « plan anti-rechute » en identifiant les situations à risque et en planifiant des issues est vital. Traiter les pièges d’attitude comme le sentiment d’avoir droit, le ressentiment, la privation et le stress avec un soutien aide à maintenir vigilance et engagement.

10. L’addiction au cybersexe impacte gravement partenaires et familles, menant souvent à la codépendance et à la honte conjugale

La codépendance, ou coaddiction, est aussi une maladie, où la réaction à la compulsion et à l’addiction entraîne la perte de soi.

Dommages collatéraux. L’addiction au cybersexe a des conséquences dévastatrices pour les partenaires et les enfants, provoquant douleur, trahison, rejet, honte et perte d’estime de soi. Elle détériore profondément les relations sexuelles et est un facteur majeur de séparation et divorce. Les enfants souffrent des conflits parentaux, du manque d’attention et d’une possible exposition à la pornographie en ligne.

La maladie du partenaire. Les partenaires développent souvent une codépendance, s’absorbant dans le comportement de l’addict et perdant leur propre identité. Cela se manifeste par :

• Collusion : couvrir ou faciliter le comportement.
• Préoccupation obsessionnelle : penser constamment aux actions de l’addict.
• Déni : ignorer la réalité du problème.
• Tourmente émotionnelle : vivre des émotions incontrôlables.
• Manipulation : tenter de contrôler le comportement de l’addict.
• Responsabilité excessive : se blâmer ou porter les problèmes de l’addict.
• Compromis/Perte de soi : agir contre ses valeurs ou abandonner ses intérêts.
• Blâme/Punition : devenir punitif ou chercher vengeance.
• Réactivité sexuelle : se fermer ou agir sexuellement en réaction.

La honte conjugale. Lorsque deux individus porteurs d’une honte fondamentale s’unissent, ils créent un couple basé sur la honte. Les problèmes relationnels comme la mauvaise communication et la gestion des conflits s’aggravent, menant à la « honte conjugale ». Y remédier nécessite un travail de rétablissement individuel et en couple.

11. Le véritable rétablissement et une sexualité saine exigent la connexion humaine et l’abord des causes profondes, pas seulement l’arrêt du comportement

Le rétablissement crée un système personnel ouvert permettant l’expansion de multiples options.

Au-delà de l’abstinence. Arrêter simplement le cybersexe (changement de premier ordre) ne suffit pas pour une guérison durable. La vraie guérison implique de démanteler la barrière interne entre l’ego et le « soi ombre » ou âme, en abordant des problématiques sous-jacentes comme la méfiance, la victimisation et la honte. Ce processus est douloureux mais conduit à une croissance personnelle profonde.

La Zone de Rétablissement. L’objectif est d’atteindre la « Zone de Rétablissement », un état d’équilibre et de connexion avec son noyau intérieur. Cela passe par :

• Développer un solide réseau de soutien (thérapeute, parrain, groupes).
• Créer des liens sociaux et s’engager dans des interactions réelles.
• Impliquer famille et amis dans le processus.
• Élaborer un Plan de Santé Internet pour un usage en ligne sain.
• Renforcer la spiritualité.

La connexion humaine est vitale. Les recherches montrent qu’un fort soutien social est crucial pour la santé physique et émotionnelle, plus encore que le régime alimentaire ou l’exercice. L’isolement, favorisé par le cybersexe, est délétère. Le rétablissement exige de rétablir des liens durables et d’apprendre à donner et recevoir du soutien.

12. Le cybersexe n’est que le début ; la société doit affronter l’impact croissant du

Dernière mise à jour: June 9, 2025